ULM LE VRAI GRAND DEPART

Avec des moyens rudimentaires,
les colons finissaient le voyage au fil de l'eau  

Poussés par le besoin de vivre un peu mieux ou par l'espoir de faire fortune, les colons partaient en direction du Banat avec l'aide de passeurs et d'une organisation à l'autrichienne sans faille.

Les routes de l'exil

Les colons qui quittaient la Lorraine ou les régions voisines de Wallonie et du Luxembourg avaient un itinéraire bien tracé par l'administration de Vienne. Souvent à pied, ou avec de modestes attelages, ceux du Nord de la Lorraine partaient par Sarreguemines, Phillipsbourg, près de Bitche puis Strasbourg où ils passaient le Rhin à Kehl. Dans la petite forteresse de Kehl, qui faisait alors partie des possessions de l'Autriche, sur la rive droite du Rhin, les colons français étaient reçus par un notaire impérial, devant lequel ils signaient un acte d'engagement comme colons et qui les munissait des secours de route et instructions nécessaires. Les gens mariés recevaient 12 Kreutzer par jour pour leur nourriture, avec un supplément de 2 Kreutzer par enfant. Les célibataires recevaient 6 Kreutzer. (1 Kreutzer = 2 centimes-or).

Ceux du Sud arrivaient également à Strasbourg par Lunéville et la traversée des Vosges.

Ensuite ils traversaient la Forêt Noire, puis suivaient la vallée Danube jusqu'à Ulm en Bade-Würtemberg ou Günzburg en Bavière, suivant les saisons et les niveaux des eaux du Danube. De là, ils poursuivaient sur le Danube, se laissant glisser sur les eaux devenues abondantes. Ils empruntaient pour les plus riches un petit bateau typique appelé "boîte d'Ulm". Les autres se contentaient d'un radeau fait de troncs d'arbres assemblés. La descente du Danube durait quatre à cinq semaines.

A Vienne (Autriche), ils devaient se présenter à un bureau de recensement et obtenaient des subsides pour la suite du voyage. Ils étaient dirigés vers un des nombreux nouveaux villages créés pour eux dans la plaine transylvanienne. Remise aussi de la somme de 3 florins (6 francs-or) pour frais de voyage jusqu'à Budapest, où, lors d'une seconde escale, cette provision était renouvelée.

Un parcours semé d'embuches

La suite de la route jusqu'au Banat était encore bien plus difficile.
Tout au long du voyage, de Lorraine au Banat, des colons mourraient, d'autres se mariaient et enfin d'autres naissaient. Bref la vie d'une communauté normale.

Pendant les préparatifs, du voyage et en cas de difficultés en cours de route, il ne faut pas négliger le rôle joué par les puissantes abbayes installées parfois sur ce chemin depuis l'époque des Croisades. Villers-Blettnach, Clairlieu et d'autres, très proches des anciens ducs de Lorraine ont joué un grand rôle dans le recrutement des candidats au départ.

La plupart des colons étaient des cultivateurs et des artisans. Voyageant par groupes composés de plusieurs familles de la même localité, ils avaient des guides spéciaux qui leur distribuaient des secours en argent.

Entre Ulm et Günzburg , le Danube commence à être navigable. Les fameuses "boîtes d'Ulm" descendaient le cours du fleuve puis étaient démontées. Les bâteaux actuels ressemblent encore beaucoup à ces Schachtel. (© JMC)		Georges von Martens, un voyageur se rendant à Vienne fit en 1824 une description des bâteaux spécifiques d'Ulm. " Au centre, se trouve une hutte en bois avec deux pièces. Celle de l'avant est pour les voyageurs de première classe. La plus grande, à l'arrière, contient les biens et les émigrés et apprentis artisans qui tant bien que mal s'y entassent. Les bagages se composent de mobilier, d'outils pour cultiver, d'habits, et même d'animaux domestiques. Pour avoir une meilleure vue, les passagers se tiennent toute la journée sur les toits plats des cabines". Nul doute que les conditions du voyage avaient déjà évolué. Mais aurait-il été à la portée des migrants du siècle précédent?
Sur le Danube, De Passau vers Linz - Gravure colorée sur métal de J.C.Armytage d'après W.H. Barlett, chez Cgeo, Virtue, Londres vers 1850. Publié dans "Passau in der Druckgraphik", images de la ville sur quatre siècles. - Fondation culturelle de l'Est Bavière, 1987.

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